Sans tambours ni trompettes.. mais avec clair-obscur, air léger et surfaces agitées.

Marie-Luce Thomas, Octobre 2003

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Souvent on me pose la question du sens. Laissons le sens à son silence un moment. Avant toutes significations, il y a des chemins ondulants, vibratoires, rétractiles, en gidouille, des chemins d’attirances, de perdition, d’étonnements, de regards qui regardent vraiment, profondément, obstinément … et ce peut être après, bien après, que peuvent se former des bribes de sens… Que souffler de son travail qui déjà montre ? Qu’il n’étreint ni n’éreinte le concept, quoique. Qu’il voudrait bien se débarrasser de ce qui fait “ plastique ” comme Pialat, dans ses films se débarrassait de ce qui faisait “ cinoche ”. Qu’il n’illustre rien ni n’énonce, dénonce, renonce. Qu’il vous dirait, somme toute, laissez-vous emballer, contourner, laissez-vous faire. Ne pas être sur ses gardes. On vagabonde. Un travail pensé sans vous, malgré tout. Un travail qui demande du temps. Pour se livrer à ces jeux parfaitement lents, patients, longs, aux extrêmes limites du fragile. Dans les zones inexplorées de l’instable, à toujours frôler l’effacement, la disparition, l’évanescence … et l’énigme aussi : “ où commence la fin de la mer ? ” (des questions à la Baricco dont on ne se lasse pas). C’est un travail pour aller voir derrière les connaissances d’autres connaissances. Une échappée hors limites. Un soir, en regardant toutes oreilles ouvertes un film de Jean Rouch, j’entends : “ chez les Dogons, pour l’intronisation du Hogon de Arou, la coutume veut qu’on lui remette trois objets qu’il gardera toute sa vie. Un de ces objets est une sorte de crochet à trois branches pour attraper les nuages car les nuages sont la parole et la parole articulée c’est la connaissance. ”…

Un travail pour articuler les nuages, peut-être, ou s’envoler plus simplement.

Marie-Luce Thomas, Octobre 2003